Le mouvement Gülen fait le point sur ses relations avec l'AKP
Suite à la propagation sur les réseaux et dans quelques médias de rumeurs sur des tensions et des rivalités politiques entre le mouvement Gülen et le gouvernement, la Fondation des journalistes et écrivains turcs (GYV) a publié un communiqué de mise au point.
La Fondation des journalistes et écrivains turcs (GYV) a répondu à une série de déclarations polémiques et d’accusations à caractère diffamatoire visant le mouvement Gülen. La GYV les voit comme destinées à susciter des tensions entre le mouvement et le gouvernement et à les opposer l’un à l’autre. En effet, sur les réseaux sociaux ainsi que dans certains médias, on parle beaucoup d’une prétendue tension croissante entre le mouvement Gülen, inspiré par le penseur musulman Fethullah Gülen, et le gouvernement AKP au pouvoir. Dans un récent communiqué, la GYV déclare que, bien qu’il incombe aux auteurs de ces déclarations polémiques d’apporter la preuve de ce qu’ils avancent, la Fondation s’estime en devoir d’y répondre, par respect pour le public et pour son droit à l’information. L’une de ces allégations est que le mouvement Gülen serait derrière les événements du parc Gezi des mois de mai et juin derniers. La GYV affirme à cet égard que les deux déclarations faites par Fethullah Gülen et la position prise par le Mouvement lors des manifestations montrent combien cette affirmation est sans fondement. «Le mouvement Gülen respecte le droit des individus à organiser des manifestations dès lors qu’elles se font dans le respect de la démocratie et qu’elles sont sans violence. Or ces manifestations ayant donné lieu à des débordements, le mouvement n’a pas appelé ses fidèles à y prendre part», déclare ainsi la GYV dans son communiqué, ajoutant qu’outre le mouvement Gülen, le président Abdullah Gül ainsi que des membres du gouvernement avaient critiqué l’usage excessif de la force par la police à Taksim durant les premiers jours des manifestations.
Les interventions présumées du mouvement Gülen en politique
Selon une autre affirmation réfutée par la GYV, le chemin devant conduire à un gouvernement alternatif passerait par la Pennsylvanie (où réside Fethullah Gülen), et qu’en conséquence ceux qui cherchent une alternative au gouvernement de l’AKP s’y rendraient dans le but de rencontrer le penseur musulman. «Ce n’est pas seulement faux ; il y a une volonté d’induire les gens en erreur dans le fait de présenter des visites faites à un leader d’opinion respecté par toutes les franges de la société comme liées à la recherche d’un gouvernement de substitution», répond la GYV, soulignant que Fethullah Gülen accorde toutes les audiences qui lui sont demandées, conformément à sa mission et à ses valeurs, et pour autant que sa santé le lui permette. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles le mouvement Gülen chercherait à infiltrer l’administration publique et à s’imposer comme un partenaire du gouvernement, la GYV affirme qu’il est absurde de prêter de pareils desseins au mouvement Gülen, qui est un mouvement civil et démocratique. «Dans les démocraties, c’est par les urnes que les gouvernements arrivent au pouvoir et c’est par les urnes qu’ils le quittent. Néanmoins, entre deux élections, citoyens et acteurs de la société civile ont parfaitement le droit de critiquer ou de faire des suggestions, quel qu’en soit le sujet, et on ne saurait voir là une quelconque ingérence dans l’administration publique», explique ainsi la GYV. La Fondation précise par ailleurs que le licenciement au sein des différents niveaux d'administration et de la fonction publique de certains «types» de personnes au motif qu'ils «établissent une tutelle» ou «cherchent à acquérir un pouvoir politique», comme cela a été fait dans le passé, est contre les principes les plus fondamentaux du droit et de la démocratie. Bien que les décisions gouvernementales et administratives du gouvernement élu par vote doivent être respectées, le texte regrette que, conformément à des rumeurs, le fait d'étiqueter des personnes en raison de leur adhésion au mouvement Hizmet et de les licencier est une pratique contraire à la Constitution turque et antidémocratique.
Pas d’ententes avec des parties pour les élections
De même, la Fondation des journalistes et écrivains turcs dément formellement les affirmations selon lesquelles le mouvement Gülen projette de s’entendre avec des partis et des personnalités politiques en vue des élections, affirmant qu’une telle alliance n’a jamais eu lieu par le passé, et qu’il n’est pas concevable pour le mouvement qu’elle puisse jamais avoir lieu. «S’allier avec un parti irait à l’encontre de l’essence même du mouvement Gülen, qui est un mouvement au-dessus des partis et dont les membres appartiennent aux horizons politiques les plus divers», souligne la Fondation. Une autre accusation polémique est celle selon laquelle le système d’écoute découvert dans le bureau du Premier ministre aurait été placé par des individus proches du mouvement Gülen. La GYV dénonce ces accusations et appelle la justice et le gouvernement à prendre les mesures nécessaires dans l’affaire du système d’écoute. Au cours d’une émission télévisée fin 2012, Recep Tayyip Erdogan a annoncé en direct que des dispositifs d’écoute avaient été découverts dans son bureau à son domicile d’Ankara, mais sans préciser quand la chose avait eu lieu. Une enquête sur l’incident est en cours.
La question du lieu de résidence
Enfin, la GYV a répondu aux allégations liées au fait que Fethullah Gülen ait établi sa résidence aux Etats-Unis et qu’il ait décidé de ne pas retourner en Turquie. Dans certains milieux, on affirme ainsi que le penseur musulman servirait les intérêts américains. «C’est une calomnie manifeste et une insulte faite à M. Gülen. Ce sont les mêmes qui faisaient ce genre d’allégations lorsque, des années auparavant, Fethullah Gülen vivait en Turquie», déclare la GYV, rappelant que sa décision de demeurer aux Etats-Unis ressortit à la volonté de l’intellectuel et leader d’opinion de ne pas nuire aux acquis démocratiques de la Turquie. En juin 2012, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan avait en effet invité Fethullah Gülen à retourner s’installer en Turquie. L’intellectuel lui a adressé ses remerciements, tout en affirmant préférer rester aux Etats-Unis afin d’ «éviter de porter préjudice aux développements positifs en cours en Turquie». Fethullah Gülen est très respecté en Turquie comme dans de nombreux pays à travers le monde, tant pour les activités éducatives qu’il a initiées, que pour les efforts qu’il déploie dans le monde entier en vue de promouvoir le dialogue entre les cultures et entre les religions. Il vit actuellement aux Etats-Unis en exil volontaire, aucun obstacle juridique ne l’empêchant de retourner en Turquie. Peu de temps après son émigration aux Etats-Unis en 2000, la justice turque l’a accusé de création d’une organisation illégale. Il a été acquitté en 2008.
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